Murat est devenu au fil du temps une valeur sûre de la musique d'ici, alignant régulièrement les bons disques comme certains enfilent les perles. En dehors du circuit médiatique de part son repli physique dans son Auvergne natale mais en même temps au coeur de l'arène à chaque période de promotion que pourtant il exècre. Car victime de son caractère trempé et bourru, il est ce qu'on appelle vulgairement un "bon client", ne mâchant pas ses mots, incapable de langue de bois. Murat est une bête curieuse, rassurante car immuable. Cette livraison annuelle pourrait peut-être changer la donne. Parce que, pour une fois, Murat a accepté de se faire aider par des voisins, The Delano Orchestra, musiciens émérites qui viennent aérer sa musique, lui ouvrir enfin des portes. "Babel" est donc une sorte de petit miracle, prenant le meilleur de chacune des parties en présence : le verbe et le sens de la mélodie du chanteur, les très beaux arrangements du groupe. Une tour, 20 titres, qui parle toutes les langues, du plus léger au plus grave. Murat y déploie toute sa palette, acquise depuis ses débuts il y a plus de 30 ans, depuis le premier 45 tours, "Suicidez-vous, le peuple est mort" qu'il considère en éternel cabochard comme sa plus grande réussite.
"Et n'y plus rien changer" nous dit-il dans le morceau de bravoure "Dans la direction du Crest", du nom d'une petite commune de sa région, région dont il n'a peut-être jamais autant parlé. A l'inverse, "Babel" prouve que tout peut encore changer et donne envie de le suivre. Il semble y avoir là-bas une source, un jaillissement, un refuge qui rassasie, ravive et protège nos vies. En ces temps de crise, de pertes de repères et de valeurs, c'est déjà beaucoup.
Clip de "J'ai fréquenté la beauté" :
Un bon mois que j'attends cette rencontre de proximité improbable.
RépondreSupprimerFaut vraiment brandir ce drapeau de poésie rare par ici..
De plus en plus encré à ses Monts.. ça devient irréversible Murat.
Je comprends. C'est vrai que Murat en impose de plus en plus. A croire qu'en France, plus qu'ailleurs, l'âge donne des ailes.
SupprimerLa difficulté de suivre Murat, c'est un peu celle des aeriste qui sont prolifiques et fideles à eux-mêmes:on sait à l'avance la qualité et l'univers qui nous attend. Puis, avec le temps, on finit par ne plus tendre l'oreille.
RépondreSupprimerJe mettrais dans cette catégorie The Fall.
Pour revenir sur Murat, j'ai pu le voir lors de sa dernière tournée, et j'ai eu une vraie bonne surprise: en solitaire avec une guitare électrique et une batterie. Et le résultat, sur un répertoire que je ne connaissais quasiment pas a été saisissant très loin de ce qu'on aurait attendu de lui.
Mettre The Fall et Murat dans la même catégorie, il fallait oser :-) Plus sérieusement, c'est vrai qu'au niveau du caractère, Mark E. Smith et Murat se ressemblent sans doute. En tout cas, ce "Babel" est effectivement une bien belle surprise. Comme quoi, après plus de trente ans de service, on peut encore tendre l'oreille à l'écoute d'un disque de Murat. Tout n'est pas perdu.
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