Accéder au contenu principal

Vashti Bunyan (+Steve Gunn) - Paris, Le Carreau du Temple, Magic Number #2 - 13 avril 2017

Les vacances scolaires sont souvent l'occasion pour maman et moi de sortir, confiant notre progéniture à nos parents. Il n'est alors pas toujours évident de trouver un concert, un film ou une expo pouvant nous intéresser - même si à Paris, nous sommes plutôt chanceux quant aux propositions culturelles. Cette fois-ci, il y avait la deuxième soirée Magic, la revue pop moderne, comme ils disent, qui est récemment réapparue sous une nouvelle formule et avec un nouveau rédacteur en chef, Vincent Théval. Ce dernier vient d'ailleurs présenter la soirée. Elle se déroule à l'auditorium du Carreau du Temple, une salle tout confort, à l'image des studios de Radio France dans lesquels Théval organisait ses excellentes Label Pop Sessions. La soirée sera intimiste. D'abord, l'Américain Steve Gunnn, seul avec sa guitare. Puis la fabuleuse Vashti Bunyan, raison évidente de notre présence, dont la musique toute en délicatesse constitue un nectar pour nos oreilles. Tant mieux, il est bon parfois de ménager nos tympans, de ne pas leur faire subir l'assaut de guitares stridentes ou de batteries surpuissantes. J'avais écouté un peu la déjà conséquente discographie de Steve Gunn avant de venir mais je n'avais pas réussi à m'accrocher à sa musique. Sa prestation toute en retenue nous a fait le même effet. C'est assurément un excellent guitariste, avec une technique irréprochable, tout en changement de rythmes. Sauf que tout ça n'est pas très mélodique et on s'ennuie assez rapidement. Dommage car si Gunn avait une voix supérieure, on pourrait se laisser transporter. C'est tout l'inverse de Vashti Bunyan. Elle a gardé à plus de soixante-dix ans, la voix angélique de ses jeunes années, pas puissante mais incroyablement émouvante. Une sorte de Leonard Cohen au féminin : ils savent jouer magnifiquement de leur voix pour nous toucher au plus profond. Toutes ces chansons brèves, aux mélodies enivrantes et immédiates, telles ces petites comptines qu'on chante au coin du feu, se ressemblent toutes. Mais comme elles ressemblent aussi à celles de nos rêves, ça n'a aucune importance. Seul regret, elle n'a pas joué "Swallow Song", incroyable chef d'oeuvre d'une évidence et d'une fluidité rares. La dame a constamment le sourire aux lèvres, contente de recevoir un tel accueil, elle qui avait disparu des radars pendant plus de trente ans par manque de succès justement. Elle est accompagnée par le brillant et discret guitariste écossais Gareth Dickson. La française Alma Forrer, déjà entendue chez Baptiste W. Hamon, vient aussi pousser la jolie chansonnette en duo avec Vashti Bunyan. On a l'impression d'être à la maison, chez une grand mère, ancienne hippie mais désormais rangée, venant nous ouvrir son coeur, nous parler de sa vie, de ses enfants, de ses déboires, le plus simplement du monde, sans jugement, d'égal à égal. C'est incroyablement touchant. La dame est accessible, douce. Elle semble venir d'un autre monde. Un monde où tout serait plus simple, plus immédiat, plus beau. Pendant plus d'une heure, elle nous a fait croire que ce monde existait vraiment, elle a suspendu le temps. On serait bien restée là-bas avec elle. Cette femme a été touchée par la grâce. Amen.

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Beak - >>>>

A peine remis du magnifique concert de Beth Gibbons, que nous apprenions la sortie surprise d'un nouvel album de Beak, groupe de Geoff Barrow depuis 2009 et la fin (?) de Portishead. Beak a la bonne idée d'intituler ses disques d'un " > " supplémentaire à chaque fois - on en est au quatrième - , comme pour dire que la formation est en constante progression, ce qui est assez vrai, tellement cette nouvelle mouture impressionne d'emblée. Les deux premiers titres, " Strawberry Line " et " The Seal " fixent la barre très haut. La production est toujours impeccable, avec une rythmique bien mise en avant, rappelant bien sûr le krautrock dont on sait que Barrow est amateur depuis " Third " chef d'oeuvre indépassable de Portishead, ce chant distant et ces chansons qui progressent lentement, créant ce climat de tension constante, dans l'attente de ce qui va suivre. La suite, moins immédiatement renversante, plus lancinante, nous ...

Nick Cave & The Bad Seeds - Wild God

  Il y a eu un tournant dans la carrière de Nick Cave : " Push The Sky Away " en 2013. Avant ce disque, le chanteur australien était cantonné aux seuls amateurs de rock indépendant ou presque. Il y a bien eu quelques percées commerciales comme celles du vénéneux et romantique " Where The Wild Roses Grow " en 1995 mais c'était surtout parce qu'il chantait en duo avec sa très iconique compatriote Kylie Minogue. En tout cas, rien qui ne suffise à le hisser au panthéon du rock, comme c'est le cas aujourd'hui. Sa musique fait aujourd'hui une quasi unanimité et surtout ses disques sont chroniqués partout, jusque dans les rares pages culture de Figaro Madame. Je ne saurais expliquer un tel phénomène. Il y a peut-être plusieurs raisons. J'en lâche ici quelques unes : la reprise dès l'an 2000 de son sublime " The Mercy Seat " par Johnny Cash, comme une validation en bonne et due forme de l'importance de sa carrière et de son influenc...

Lucie

L'autre jour, en lisant l'article intitulé « ça rime à quoi de bloguer ? » sur le très bon blog « Words And Sounds » - que vous devez déjà connaître, mais que je vous recommande au cas où cela ne serait pas le cas - je me disais, mais oui, cette fille a raison : « ça rime à quoi la musique à papa? ». Enfin, non, sa réflexion est plutôt typiquement féminine : trouvons un sens derrière chaque chose ! Nous, les hommes, sommes plus instinctifs, moins réfléchis. C'est sans doute pour ça que dans le landernau (je ne sais pas pourquoi, j'aime bien cette expression, sans doute parce que ça fait breton :-) des « indierockblogueurs », il y a surtout des mecs. Un mec est par contre bizarrement plus maniaque de classements en tout genre, surtout de classements complètement inutiles dans la vie de tous les jours. Pour ceux qui ne me croient pas, relisez donc Nick Hornby. Et je dois dire que je n'échappe pas à la règle, même si j'essaie de me soigner. J'ai, par exemple,...