2023, fin de la partie. Bonjour 2024 et bonne et heureuse année à toutes et tous ! Je termine cette fois-ci un premier janvier, sur le fil, histoire de bien clôturer l'affaire, sans anticipation. Avant de vous dire qu'il s'annonce plein de bonnes choses musicalement parlant pour la nouvelle année, voici un récapitulatif de l'an dernier en 10 albums. 10 disques choisis le plus subjectivement possible, parce que ce sont ceux qui m'ont le plus emballé, le plus suivi pendant douze mois et qui je pense, me suivront le plus longtemps encore à l'avenir.
10- Young Fathers - Heavy, Heavy
Ces jeunes pères de famille inventent une pop futuriste à partir de mixtures de TV On The Radio, Animal Collective ou autre Massive Attack. C'est brillant, novateur, stimulant, mais cela a parfois le défaut de ses qualités : notre cerveau est régulièrement en surchauffe à l'écoute de ces morceaux bien trop denses pour le commun des mortels, incapable de retenir autant de sons, d'informations à la fois. Mais "Heavy Heavy" n'en reste pas un moins un des disques les plus essentiels de 2023, étant donné qu'on sait qu'on mettra longtemps avant d'en décrypter tous ses mystères.
9- JW Francis - Dream House
Cette fois-ci, le son est plus limpide, moins heurté, coule même de source. "Dream House" ressemble à une pop rêvée, à hauteur d'enfant, comme la maison qui orne la pochette du dernier disque de JW Francis, sorte de Mac Demarco qui aurait abandonné tout once de prétention. Une pop débarrassée de tous les maux d'adultes, refuge salvateur pour tous les gosses qui sommeillent en nous.
8- Blur - The Ballad of Darren
On ne s'attendait pas à un nouveau disque de Blur, même si le groupe n'était pas officiellement séparé. Il a fallu que Damon Albarn demande à ses anciens acolytes de rappliquer pour mettre en son des nouvelles compositions qu'il ne voyait pas habiller autrement pour que la magie opère à nouveau. "The Ballad of Darren" est l'album le plus court de Blur, le plus modeste et direct aussi. Ces chansons qui peuvent paraître de prime abord banales finissent par produire leur effet. Albarn conserve ce talent de mélodiste hors norme qui transforme chacune de ses productions en oeuvre importante. Et c'est bien dommage que leur tournée consécutive ait été réduite à sa portion congrue, en France tout du moins.
7- Squid - O Monolith
C'est souvent comme ça que ça se passe : gros buzz pour le premier album, parce que style singulier qui change de l'ordinaire et puis oubli pour le second disque, alors que justement la formule s'est peaufinée, a gagné en profondeur, en diversité, en efficacité. "O Monolith" est encore plus impressionnant que "Bright Green Field", même si moins intimidant, car plus sûr de sa force, celle-ci est aussi contenue, maîtrisée. En tout cas, voilà un album particulièrement long en bouche qui avance ses pions progressivement, au fil des écoutes. On sait bien comment ça se terminera, par un implacable échec et mat.
6- Jaakko Eino Kalevi - Chaos Magic
Ce grand finlandais restera en 2023 comme mon premier et presque seul concert de l'année. Ce fut une belle soirée, simple, un peu fantaisiste comme peut l'être le chanteur. Son dernier album est un bel aperçu de l'étendue de son talent de compositeur, rappelant un Ariel Pink en plus décontracté, moins punk aussi. Il y a dans cette musique-là une légèreté non feinte, qui rend le tout agréable à l'oreille. Impossible de se lasser d'écouter "Chaos Magic" qui incite à appuyer au contraire sur la touche "Repeat" inlassablement.
5- Zaho de Sagazan - La Symphonie des éclairs
Voici notre disque familial de l'année, celui qui a remporté les suffrages les plus larges. Zaho de Sagazan a réussi à faire une unanimité que Stromae n'avait qu'à peine effleuré. Car sous ses airs de jeune fille fraîche, sa musique est encore plus mature que celle du grand belge dégingandé. Cette maturité se perçoit davantage dans les arrangements que dans des textes pourtant très beaux - on ne se lasse pas de la poésie du morceau titre, "La Symphonie des éclairs" par exemple. Le rendez-vous est déjà pris lors du prochain Rock en Seine, le 25 août, où la Nazérienne sera programmée dans le cadre d'une affiche plus dantesque que jamais et donc immanquable.
4- Blonde Redhead - Sit Down for Dinner
Après Blur, voici une autre reformation surprise avec ce qui pourrait être en plus leur meilleur disque, le plus soigné, celui qu'on réécoutera le plus souvent. "Sit Down for Dinner" est l'album d'un groupe arrivé à maturité, qui déroule tout son savoir-faire, de manière naturelle, sans effet, parce qu'il connaît le pouvoir addictif de sa musique, de ses voix plus justes que jamais, de ces savants entrelacs de guitares. Je les ai ratés à Paris cet automne. Ils seront au programme de la Route du Rock l'été prochain avec un certain Etienne Daho, l'occasion de se rattraper ? Enfin.
3- Gontard - 2032
Nicolas Poncet, alias Gontard, continue son chemin en dehors des circuits balisés, tellement en dehors qu'il galère à se produire en concert, se contentant de circuits parallèles et de petites salles. C'est dommage, je l'attendrai volontiers à Paris, l'an prochain, histoire de faire avec lui "Reset". Ce "2032" est un album noir aux textes de plus en plus ciselés mais qui garde malgré tout cette lueur d'espoir, parce que même si le constat sur notre société actuelle est accablant et lapidaire, le garçon garde une profonde croyance dans l'être humain, ce qui ouvre forcément le champ de possibles et permet d'entrevoir une lumière, là, tout au bout du tunnel. Mais en plus des textes, il y a aussi la musique - l'album est même sorti en version instrumentale - plus efficace que jamais. Le fond et la forme, c'est évidemment suffisant pour en faire mon disque français de l'année. Facile.
2- H. Hawkline - Milk For Flowers
H. Hawkline est un ami de longue date de la brillante Cate Le Bon. On entend la patte, le style de cette dernière, dans ce "Milk For Flowers". Mais on y entend plus que cela : la personnalité de ce grand gallois, qui a vécu un drame personnel avec la perte de son père. C'est suite à cela qu'il a composé ce qui restera comme une des grandes oeuvres pop de 2023 : mélodique, intelligente, entraînante, émouvante. On passe par tous les sentiments. Et à l'image des albums de sa compatriote, "Milk For Flowers" gagne en saveur au fil des écoutes, comme tous les albums qui comptent.
1- Youth Lagoon - Heaven is a Junkyard
Voilà un disque miraculeux. Miraculeux car la vie de son géniteur, Trevor Powers, a failli basculer après une grave maladie. Miraculeux, car il y est justement question de paradis, même si celui-ci ressemble au cerveau un peu dérangé de Youth Lagoon. Miraculeux, comme cette musique délicate, modeste, qui touche directement en plein coeur. Finis les différents effets de manche qui ornaient précédemment ses albums, le chanteur n'a gardé ici que le strict minimum, des mélodies taillées au cordeau, avec juste ce qu'il faut d'apparat. Comme le disque de Princess Chelsea l'an passé, celui de Youth Lagoon n'est peut-être pas le plus brillant, le plus intelligent, mais il distille naturellement une telle émotion que c'est celui qui m'a le plus touché.
Bonne et heureuse année 2024 avec pleins de concerts et de beaux albums ! Je ne connais pas tout de ta sélection, mais j'ai écouté cette semaine Ralfe Band et il aurait mérité un top 10 !
Merci Papa de la musique pour toutes tes chroniques du lundi. Je les attends fidèlement, mais j’aimais bien aussi quand tu les publiais de façon plus aléatoire ! Merci tout particulièrement pour l’album de Fredda qui nous permet de patienter en attendant celui de Barbara C. Et puisque tu sembles t’intéresser davantage à la musique française, je me permets de te conseiller l’album formidable de Signal Faible. Et s’il te plaît, continue… Alain M.
A peine remis du magnifique concert de Beth Gibbons, que nous apprenions la sortie surprise d'un nouvel album de Beak, groupe de Geoff Barrow depuis 2009 et la fin (?) de Portishead. Beak a la bonne idée d'intituler ses disques d'un " > " supplémentaire à chaque fois - on en est au quatrième - , comme pour dire que la formation est en constante progression, ce qui est assez vrai, tellement cette nouvelle mouture impressionne d'emblée. Les deux premiers titres, " Strawberry Line " et " The Seal " fixent la barre très haut. La production est toujours impeccable, avec une rythmique bien mise en avant, rappelant bien sûr le krautrock dont on sait que Barrow est amateur depuis " Third " chef d'oeuvre indépassable de Portishead, ce chant distant et ces chansons qui progressent lentement, créant ce climat de tension constante, dans l'attente de ce qui va suivre. La suite, moins immédiatement renversante, plus lancinante, nous ...
Il y a eu un tournant dans la carrière de Nick Cave : " Push The Sky Away " en 2013. Avant ce disque, le chanteur australien était cantonné aux seuls amateurs de rock indépendant ou presque. Il y a bien eu quelques percées commerciales comme celles du vénéneux et romantique " Where The Wild Roses Grow " en 1995 mais c'était surtout parce qu'il chantait en duo avec sa très iconique compatriote Kylie Minogue. En tout cas, rien qui ne suffise à le hisser au panthéon du rock, comme c'est le cas aujourd'hui. Sa musique fait aujourd'hui une quasi unanimité et surtout ses disques sont chroniqués partout, jusque dans les rares pages culture de Figaro Madame. Je ne saurais expliquer un tel phénomène. Il y a peut-être plusieurs raisons. J'en lâche ici quelques unes : la reprise dès l'an 2000 de son sublime " The Mercy Seat " par Johnny Cash, comme une validation en bonne et due forme de l'importance de sa carrière et de son influenc...
L'autre jour, en lisant l'article intitulé « ça rime à quoi de bloguer ? » sur le très bon blog « Words And Sounds » - que vous devez déjà connaître, mais que je vous recommande au cas où cela ne serait pas le cas - je me disais, mais oui, cette fille a raison : « ça rime à quoi la musique à papa? ». Enfin, non, sa réflexion est plutôt typiquement féminine : trouvons un sens derrière chaque chose ! Nous, les hommes, sommes plus instinctifs, moins réfléchis. C'est sans doute pour ça que dans le landernau (je ne sais pas pourquoi, j'aime bien cette expression, sans doute parce que ça fait breton :-) des « indierockblogueurs », il y a surtout des mecs. Un mec est par contre bizarrement plus maniaque de classements en tout genre, surtout de classements complètement inutiles dans la vie de tous les jours. Pour ceux qui ne me croient pas, relisez donc Nick Hornby. Et je dois dire que je n'échappe pas à la règle, même si j'essaie de me soigner. J'ai, par exemple,...
Merci pour ces partages musicaux pendant l'année écoulée ! mention spéciale pour le disque des oracle sisters qui fut pour moi une sacrée découverte.
RépondreSupprimerBonne année 2024. Longue vie à LA MUSIQUE À PAPA. Fidèle lecteur depuis plusieurs années ;)
RépondreSupprimerBonne et heureuse année 2024 avec pleins de concerts et de beaux albums ! Je ne connais pas tout de ta sélection, mais j'ai écouté cette semaine Ralfe Band et il aurait mérité un top 10 !
RépondreSupprimerPale fire...quel morceau !!
SupprimerMerci Papa de la musique pour toutes tes chroniques du lundi. Je les attends fidèlement, mais j’aimais bien aussi quand tu les publiais de façon plus aléatoire ! Merci tout particulièrement pour l’album de Fredda qui nous permet de patienter en attendant celui de Barbara C. Et puisque tu sembles t’intéresser davantage à la musique française, je me permets de te conseiller l’album formidable de Signal Faible. Et s’il te plaît, continue…
RépondreSupprimerAlain M.