Je crois que cela fait longtemps qu'on n'avait pas assisté à autant de concerts en une seule année. D'abord, nos deux festivals préférés de l'été : La Route du Rock, avec une fois de plus une très belle affiche, Metronomy et Deerhunter le même jour, c'était difficilement ratable; Rock en Seine, rien que pour les mythiques Cure, alors qu'on croyait le festival définitivement perdu pour le rock après la programmation désastreuse de l'an passé. Des concerts pour vieux, musique à papa oblige : John Cale pour une rétrospective de fin de carrière à la cité de la Musique, le show spectaculaire en 3D de Kraftwerk, toujours à la Villette, les toujours fringants et quand même moins vieux Innocents en banlieue parisienne. Pour Built to Spill, il s'agissait moins de nostalgie que de vraies redécouvertes pour moi. Les vétérans américains jouaient leur meilleur disque, l'impeccable "Keep it like a secret" de 20 ans d'âge. Pour Mathieu Boogaerts, ce fut tout autant pour les enfants que pour nous, même s'il n'a pas chanté un titre de son éternel "Super" sorti en 1995, déjà. L'album est devenu un des plus écoutés à la maison. Barbara Carlotti et Bertrand Belin, le même soir à Villejuif, c'était pour nous, inratable. Un trio de chanteuses parfaites avec Anna Calvi, Weyes Blood et Cate Le Bon, pour des concerts d'une totale maîtrise où l'émotion venait tout de même pointée régulièrement. Enfin, Chevalrex, que je voulais voir depuis longtemps, et qui ne m'a pas déçu, dans une formation plus large qu'à l'accoutumée. Bref, une belle année de concerts où il fut bien difficile de n'en retenir que 5.
5. Les Innocents au centre culturel Paul B. de Massy
Les Innocents, c'est un des rares groupes que j'ai écouté adolescent et que j'écoute encore maintenant. De "Jodie" chantée ce soir-là dans une étonnante et belle version dénudée au dernier disque "6 et demie", c'est la même volonté, le même talent pour trousser de jolies mélodies pop françaises qui tiennent la comparaison avec la meilleure anglo-saxonne. La soirée avec Olivier Marguerit en première partie fut de plus marquée sous le signe du passage de témoins entre générations, d'autant que ce dernier a même joué ensuite avec ses aînés JP et JC pour une bien belle soirée.
4. Anna Calvi à la Route du Rock, Collection Hiver
Ça s'est fait à la dernière minute, un weekend passé en Bretagne et la possibilité de faire un crochet le samedi soir à Saint-Malo. Je n'avais pas parlé ici de son dernier disque "Hunter" pourtant très bon mais c'est surtout en concert que son talent sidère. Seule, c'est encore plus frappant. Cette fille a une classe folle. Dès le premier morceau, elle écrase la concurrence. Combien d'artistes rock sont capables d'occuper la scène de la sorte avec sa seule voix et une guitare ?
3. Bertrand Belin et Barbara Carlotti au théâtre Romain Rolland de Villejuif
Ça ressemblait à une affiche rêvée et ce fut le cas, les deux pour le prix d'un. Deux artistes que l'on suit depuis de nombreuses années et pour lesquels on aime chaque nouveau disque. Le journaliste Daniel Schneidermann du site Arrêt sur Images a seulement fait leur connaissance pendant les dernières grèves de Radio France et ne s'en est pas remis. Pas remis d'être passé à côté de ces deux-là depuis tant d'années. L'époque est drôle, au-delà de la surdose d'informations dont on est quotidiennement abreuvé, elle oublie l'essentiel. Les choses qui comptent vraiment. La culture, la vraie. Celle qui rend nos vies plus supportables, meilleures.
2. The Cure à Rock en Seine
Les Cure étaient l'un des premiers concerts auquel j'ai assisté, c'était au moment de la sortie de leur disque injustement mal aimé "Wild Mood Swings" à Rennes en 1996 et j'en gardais un agréable souvenir. Même si je m'étais aperçu que je connaissais pas si bien la musique du groupe, la fin de leur prestation fut un véritable feu d'artifice de titres célèbres. A Rock en Seine, cette année, j'ai depuis révisé et je connaissais tous les morceaux. La formation de Robert Smith est devenue par le biais de concerts marathon et de shows impeccables plus que par des nouvelles chansons une formation qui attire, qui remplit les stades, les festivals. Rock en Seine est revenue dans la course, grâce à eux. Quid pour 2020 car il n'existe pas pléthore de groupes de rock aussi rassembleurs que les Cure ?
Ceux-là étaient en pole position des concerts qu'on souhaitait voir depuis que "The Man Machine", leur album sorti en 1978, est devenu l'un de nos disques cultes. Un live de Kraftwerk ne ressemble à rien d'autre. Derrière leur pupitre, les quatre sexagénaires voire septuagénaires, balancent leur son synthétique à la façon de professeurs de fac, tels des cours magistraux. Derrière eux, un écran diffuse des images 3d qu'il faut regarder avec les lunettes distribuées à l'entrée. Chaque chanson a son thème : les robots, les autoroutes, les trains à grande vitesse, le tour de France, comme autant de sujets, de questionnements en rapport avec la modernité. Kraftwerk n'a rien perdu de sa pertinence aujourd'hui et leur show demeure de véritables oeuvres d'art qui donnent à entendre, à penser et à rêver.
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